DES RÉSULTATS ÉCONOMIQUES EXCELLENTS
Le chiffre d’affaires de Capgemini Infra, 3ème sur le marché français « infrastructures services » derrière Orange et IBM, a augmenté de 4,6 % en 2021 par rapport à 2020 et il a retrouvé quasiment son niveau de 2019, année d’avant la « crise » liée au Covid.
En terme de profitabilité, la « GOP » a bondi de 2,2 points en 2021 pour atteindre 9,1 % du chiffre d’affaires. La direction s’est félicitée que le périmètre Infra s’aligne presque sur la moyenne française (10,2 %) et se rapproche de celle du groupe au niveau mondial (12,9 %). Cela est dû en grande partie au recours croissant à l’offshore, en Inde, en Pologne, en Roumanie, etc., où les salaires de nos collègues sont plus bas. Parmi les autres facteurs, il y a la baisse de l’intermission, la baisse des coûts de location (avec la fermeture de sites), la « maîtrise » des frais de déplacements…
Pour les 3 prochaines années, la direction prévoit une croissance du chiffre d’affaires sur Infra de l’ordre de 6 %, soit le double de l’évolution du marché. Et une hausse de la « GOP » qui pourrait atteindre 11,6 % en 2024. Bref, tout va bien chez Capgemini, sauf nos salaires.
DES EFFECTIFS QUI NE SUIVENT PAS
Le nombre de salarié·es en CDI (Contrat à Durée Indéterminée) n’a progressé que de 3,9 % en 2021 par rapport à 2020 (à comparer aux +12,9 % des effectifs offshore). Pour la première fois, le taux de sortie chez Infra est supérieur à celui de l’UES. Plus inquiétant, le taux de démission a beaucoup augmenté chez les salarié·es avec 3-4 ans d’ancienneté, et encore plus chez les salarié·es avec 5-9 ans d’ancienneté où il est devenu bien supérieur à celui d’avant la « crise » liée au Covid. Tout cela en dit long sur l’incapacité de l’entreprise à garder des salarié·es ayant de l’expérience, en leur offrant une progression salariale acceptable.
La situation de l’emploi sur certains sites devient préoccupante. Ainsi en 2021, Cherbourg a décroché de très loin la 1ère place pour le taux de licenciements et de ruptures conventionnelles avec 6,1 % de ses effectifs. Bordeaux a connu un taux de démission de près de 20 %. Niort et Pau ont vu leurs effectifs reculer de près de 10 %, ce qui hypothèque leur avenir !
La direction prévoit une augmentation des effectifs Infra de 5 % en 2022. Or, sur le 1er semestre, l’accroissement du nombre de salarié·es, hors mutations, atteint péniblement 1,8 %. Le nombre de démissions en est déjà à 80 % de celui pour toute l’année 2021. Ce n’est donc vraiment pas gagné, même si la direction compte sur l’augmentation des POEI (22 % des recrutements en CDI en 2021) et de l’alternance (3,6 % des salarié·es en CDI en 2021), avec des subventions publiques à la clé
(l’entreprise touche jusqu’à 8000 euros de subvention publique par alternant !).
La direction, qui affiche des prévisions de chiffre d’affaires et de GOP sur les années 2023 et 2024, n’a pas fait de prévision sur les effectifs : c’est sûrement plus prudent !
LE CLOUD ET LA CYBERSÉCURITÉ : LES NOUVEAUX ELDORADOS ?
La direction se réjouit que le chiffre d’affaires du pôle cybersécurité d’Infra ait progressé de 26 % en 2021 : sauf que cela ne représente que 4 % du chiffre d’affaires total d’Infra. En regroupant l’ensemble de son activité cybersécurité dans Infra, avec l’intégration au 1er janvier 2022 de la partie cybersécurité d’Appli, puis à venir celle d’Altran au 1er janvier 2023, la direction espère une meilleure visibilité par rapport aux clients.
Seulement voilà : Capgemini est 3e sur le marché français de la cybersécurité, loin derrière les leaders Orange et Atos. Et comment, dans ce marché en forte croissance, où les compétences sont rares et demandées, Capgemini, avec sa politique salariale, qu’on connaît bien et qu’on subit année après année, pourrait recruter massivement, et surtout garder, des salarié·es expérimenté·es ?
La direction s’autocongratule de ce que Capgemini serait le leader français du « cloud ». A vérifier. Et à noter que le « cloud », même s’il est en solide expansion, ne compte que pour 1/4 du marché français des IT (Technologies de l’Information).
Et puis à Capgemini, le « cloud » concerne surtout les périmètres Appli et Consulting. La direction a renommé le périmètre Infra en CIS (Cloud Infrastructures Services), mais c’est largement usurpé : de son propre aveu, le « cloud » représente moins de la moitié du chiffre d’affaires d’Infra. Sinon, où en est la joint-venture, donc en dehors du périmètre de l’UES, que Capgemini a créé avec Orange sur le « cloud » ? La direction n’a rien à déclarer à ce sujet.
UN 2e TOP DÉPART ?
Depuis un an, la direction a déployé sur les sites de Grenoble et de Chambéry, soit environ 500 salarié·es Infra, un outil de déclaration des horaires de travail appelé Time Of Presence (TOP). Un an, c’est long, mais apparemment ce n’est pas suffisant pour finaliser l’outil : la direction entend poursuivre cette expérience pilote un an de plus, en l’étendant cette fois aux sites de Toulouse (en tout 1500 salarié·es).
Il faut dire que la situation n’a guère évolué : toujours aucune interface avec les outils existants (ce qui oblige les salarié·es à saisir des informations en double), des bugs qui ne sont pas corrigés, des alertes (autour de 200 par mois) qui ne sont pas réellement traitées, etc.
Cri du cœur de la direction : « Ah si on pouvait s’en passer ! ». Mais les salarié·es se passeraient bien volontiers de cet outil maison, pas convivial, isolé, buggé, qui de plus fractionne, en violation du code du travail, les temps de repos pour les collègues intervenant en astreintes ou en opérations planifiées. Par contre, les salarié·es ont besoin, comme l’établit le code du travail et comme l’a rappelé à plusieurs reprises l’Inspection du Travail, d’une mesure de leur temps de travail réel, ce qui permettrait notamment le respect des temps de repos légaux et le paiement des heures supplémentaires effectuées.
Nous rappelons d’ailleurs que la direction a déjà été condamnée en première instance au pénal le 04 mai 2021 sur le non-respect des temps de repos.