LE DÉBUT DE LA FIN DE LA GRANDE RÉORG RH
La direction présente son projet mondial et global de « transformation RH » baptisé Pxcell. Non, cela n’a rien à voir avec la technologie du même nom développée par la Nasa. En jargon Capgemini, Pxcell signifie « people experience » : on peut craindre que les salarié·es fassent un « very bad trip » !
La direction avait vaguement évoqué Pxcell en octobre 2022 : une com « bullshit » (« une fonction RH globale, intégrée et agile », « une organisation centrée sur les talents », « pour développer une expérience collaborateur digitale et innovante », « pour porter l’innovation », etc.), et un calendrier étalé sur 3 ans avec 4 vagues géographiques (par groupe de pays). Elle s’était bien gardée à l’époque de présenter une vue d’ensemble avec son ordonnancement en 5 (ou 6) parties. Elle a ensuite consulté le CSEC sur chaque partie, l’une après l’autre, indépendamment des autres. La direction aurait voulu brouiller les pistes, masquer les interactions croisées entre ces différentes parties, minimiser l’impact sur les conditions de travail des salarié·es, qu’elle ne s’y serait pas prise autrement.
Le premier étage de la fusée Pxcell, c’était « getsuccess » (voir flash CGT CSEC de janvier 2023). Ensuite il y a « people manager » et « taxonomie » (ah non, la direction dit que « taxonomie » ne fait pas partie de Pxcell : pourtant, voir ci-après), puis « unified grades » et « professionnal communities » (voir flash CGT CSEC d’octobre 2024). L’atterrissage est prévu en France pour avril 2025.
Le DRH de l’UES Capgemini prévient que la mise en œuvre prendra du temps. Il faut, parait il, « changer de culture d’entreprise » : le DRH invoque la fameuse nécessité du changement, pour être plus performant, plus efficace, plus réactif, etc., (c’est forcément positif puisque c’est la direction qui l’élabore et qui le conduit !) et tance le « conservatisme » (sic) des représentant·es du personnel qui seraient réfractaires au changement.
A la CGT, nous cherchons à comprendre et force est de constater qu’il manque encore pas mal de pixels pour avoir une image complète et précise de Pxcell. Ce qui est certain, c’est que ce projet, comme quasiment tous les projets de la direction, est « orienté business », c’est-à-dire qu’il vise à faire des économies sur les coûts de gestion du personnel et à dégager encore plus de profits, au détriment des conditions de travail des salarié·es.
« ORGANISATIONS ET SOLUTIONS »
Ce dernier étage de Pxcell intègre une réorganisation et une séparation hiérarchique des fonctions de recrutement et des fonctions RH proprement dites. Cette séparation du recrutement ne préfigure pas pour autant un changement de modèle. Capgemini continuera à recruter des grades A, c’est-à-dire principalement des jeunes frais émoulus d’écoles d’ingénieurs, qui quitteront l’entreprise au bout de quelques années car leurs salaires ne sont pas suffisamment augmentés, et qui seront remplacé·es par d’autres jeunes nouvellement diplômé·es.
A LA CGT, NOUS CHERCHONS À COMPRENDRE ET FORCE EST DE CONSTATER QU’IL MANQUE ENCORE PAS MAL DE PIXELS POUR AVOIR UNE IMAGE COMPLÈTE ET PRÉCISE DE PXCELL.
Cette réorg est annoncée à effectif constant. Mais, précise la direction, pas forcément avec les salarié·es en poste actuellement. D’une part, les salarié·es qui n’adhéreront pas à la nouvelle organisation partiront : « de l’attrition naturelle » selon la direction. D’autre part, il y aura une augmentation des effectifs « offshore », au moins sur la partie RH.
Le changement pèsera principalement sur les épaules des équipes RH. Pas de soucis, la direction a tout prévu, elle a élaboré « un plan de prévention », avec l’aide d’un cabinet externe spécialisé dans les RPS (risques psychosociaux). La montagne accouche d’une souris : en fait « d’analyse approfondie des RPS », il y a 4 diapos dans le document, qui en compte 69, présenté par la direction, et aucun rapport ne sera rédigé.
Cela impactera aussi les conditions de travail de l’ensemble des salariéEs. Des nouveaux « process » intégrés dans l’outil SucessFactors remplaceront des outils très utilisés, comme MyConnect ou MyLearning par exemple. Les salarié·es posteront toutes leurs demandes de modifications administratives ou contractuelles dans SuccessFactors. Et après c’est la boite noire : le retour se fera par un chatbot au niveau 0, ou par des équipe « offshore » au niveau 1, ou par des équipe « onshore » aux niveau 2 et 3. La direction répète que c’est pour « le bien être » du ou de la salarié·e et iel doit « comprendre et ressentir les bénéfices de la transformation ». Et puis cela va lui donner « plus d’autonomie » : traduisez plus de tâches administratives à sa charge.
RETOUR SUR « TAXONOMIE » ET « PEOPLE MANAGER »
Pour résumer (cf flash CGT CSEC de septembre 2024), la partie « taxonomie », c’est la réorg de l’ensemble des Business Lines (BL), avec leur normalisation au niveau mondial et leur découpage en practices et sub-practices (minimum 100 salariés), la partie « people manager » c’est la mise en place d’un management unique de proximité, avec la suppression des « career manager ». La direction affirme que ce sont 2 projets indépendants qui avancent en parallèle, « taxonomie » serait organisationnel, alors que « people manager » serait RH. L’expertise commandée par le CSEC l’infirme : les 2 projets sont bien liés et appartiennent tous les deux au mégaprojet Pxcell.
Les « people manager » s’intègreront dans une subpractice de la « taxonomie » et devront respecter les mêmes critères, à savoir la priorité à la proximité métier plutôt qu’à la proximité géographique.
Dans l’état actuel, il existe beaucoup d’inconnues (la liste ci-dessous n’est pas exhaustive !) :
- comment s’articuleront les practices et les sub-practices de la « taxonomie » avec les « communautés professionnelles » ?
- comment sera réparti l’ensemble des salarié·es dans les différentes practices et subpractices ?
- quels seront les critères de « cross-staffing » des salarié·es pour les missions internes, pour un client, à l’international, etc. ?
Avec le risque d’éclatement des équipes actuelles qui travaillent principalement sur des missions locales et la crainte d’une mise en concurrence des salarié·es entre elleux, d’une compétition permanente entre les équipes, les pays.
- quels sont les critères de désignation des « people manager » (hors le grade minimum C) et comment seront déterminées les équipes de salarié·es qu’iels encadreront ?
- combien y aura-t-il de « people manager »(avec 4 à 10 salarié·es à manager, leur nombre peut varier de 2900 à 7000) ?
- que deviendront les salarié·es que la direction veut nommer « people manager » mais qui ne souhaitent pas le devenir et qui préfèrent continuer à développer leur expertise technique ? Que deviendront les « career manager » (leur nombre actuel est de 6142) qui ne seront pas promu·es « people manager » ?
- quelles relations entre les « people manager », qui seront des responsables hiérarchiques N+1, et les services RH remodelés ? – quand les différents « mapping », répartissant l’ensemble des salarié·es dans les 25 « communautés professionnelles », dans les practices et les sub-practices de « taxonomie », seront-ils communiqués ?
La direction n’apporte pas de réponse à ces questions mais répète que le calendrier prévisionnel doit être tenu. Bref, on y va… dans le mur ?