La direction d’Airbus a largement communiqué sur ses pertes financières et entretient ainsi un climat anxiogène de crise. Pourtant les résultats sont loin d’être mauvais.
Un résultat opérationnel positif et un carnet de commandes confortable
Le résultat opérationnel de +1,7 Md€ montre que l’entreprise se porte bien avec un niveau de livraisons qui reste élevé (566 avions livrés, 9 A400M, 300 hélicoptères). A titre de comparaison, en 2015, Airbus livrait 635 avions et versait 1 Md€ de dividendes aux actionnaires.
Certains secteurs économiques sont à l’arrêt (tourisme, culture, restauration), c’est loin d’être le cas de la filière aéronautique. Le carnet de commande reste à un niveau très élevé, soit près de 10 ans de production devant nous. Quels autres secteurs peuvent se prévaloir d’une telle situation aujourd’hui ?
Les chiffres parlent d’eux même, la production actuelle et le carnet de commandes ne justifient pas des suppressions d’emplois par milliers à Airbus et surtout dans toute sa chaîne de sous-traitance !
Si le résultat net final est de -0,5 Md€ c’est en raison de la prise en compte de 2,2 Md€ de provisions dont 1,2 Md€ pour le paiement du plan de « restructuration » (PSE). C’est donc le plan « social » qui fait passer le solde en négatif et qui se justifie à lui-même !
Trésorerie : merci Enders !
Malgré la baisse des livraisons et les discours pessimistes de la direction d’Airbus, la trésorerie reste à un niveau élevé avec 4,3 milliards d’euros. Et encore, c’est le paiement de l’amende pour faits de corruption de 3,6 Md€ début 2020 qui vient plomber la trésorerie. Rappelons que cette amende est liée aux pratiques de la direction générale du Groupe sous la présidence de M. Enders, qui est parti avec une retraite confortable de 38,6 M€.
Pourquoi les salarié·es de la filière devraient-ils subir les conséquences de tels comportements ? C’est inadmissible !
L’argent public utilisé pour compenser la baisse de R&D d’Airbus !
Airbus profite des aides de l’État par le biais du Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile (CORAC) pour baisser de 15 % l’autofinancement de sa Recherche et son Développement (R&D). Alors que les aides de l’État devraient permettre d’accélérer la décarbonation de l’aviation, et donc s’ajouter à l’autofinancement d’Airbus pour la R&D. Or ces aides viennent remplacer cette baisse des investissements d’Airbus !
Rappelons que baisser le niveau d’investissement en R&D est une décision stratégique de la direction afin de préserver sa trésorerie. Ne serait-ce pas au contraire le moment d’investir dans la R&D d’un avion décarboné et de commencer à se diversifier vers la transition écologique ?
A cela il faut ajouter que l’Activité Partielle de Longue Durée (APLD) financée par l’État est utilisée par Airbus pour réorganiser les conditions de travail, annualiser le temps de travail et imposer encore plus de flexibilité aux salariés.
L’argent public utilisé pour restructurer la filière à la main d’Airbus !
La CGT revendique que l’utilisation de l’argent public soit soumise à des conditions de maintien des emplois, suivies des contrôles sur son utilisation qui doit permettre de diversifier l’activité sur la filière, en particulier vers la transition énergétique qui est un gisement d’emplois, notamment pour les compétences et les savoir-faire de l’aéronautique.
Or nous constatons que toutes ces aides viennent en réalité subventionner les projets de restructuration d’Airbus, pour augmenter la profitabilité de l’entreprise et donc les gains des actionnaires. Les salariés financent par leur impôt sur le revenu et leurs impôts locaux, leur propre licenciement, ça suffit !
L’objectif de la direction : plus de profits sur le dos des salarié·es
C’est bien cet objectif qui est visé par les dirigeants d’Airbus comme indiqué sur la présentation de résultats : “Nous visons une croissance durable des dividendes avec une redistribution de 30 à 40 % des bénéfices aux actionnaires”.
Ils ont d’ailleurs l’assurance d’être récompensés pour cela : en octobre 2020, en pleine période de négociation du plan de suppression d’emplois, les 1600 plus hauts dirigeants de l’entreprise se sont vus attribuer 420 000 actions gratuites (247 500 en 2019 soit près de 70 % d’augmentation)
En conclusion
La lecture des résultats financiers confirme l’analyse de la CGT. La baisse actuelle du trafic aérien ne justifie pas les suppressions d’emplois et les milliards accordés par le gouvernement, les régions et les collectivités locales, sans réelle conditionnalité.
Les directions de la filière aéronautique veulent « simplement » utiliser cette période de crise pour augmenter la profitabilité actionnariale sur le dos des salariés : une thérapie du choc en somme, qui consiste à profiter de la sidération et de la peur des citoyens lors d’une crise pour réaliser des changements inimaginables en dehors de ces périodes.
C’est exactement ce que fait la direction de Capgemini : elle ment délibérément sur la situation économique de Capgemini en France et surfe sur ce climat de crainte sur l’emploi. Cela lui permet de ne pas augmenter les salaires, rogner sur les indemnités de télétravail, etc…
Il n’y a pas de fatalité : la situation actuelle n’est pas justifiée par la crise Covid-19 ou par la situation économique.
Elle résulte de choix opportunistes des directions d’entreprises.
Pour la survie de nos emplois, de nos savoir-faire et de nos territoires, refusons cette destruction et exigeons la conditionnalité des aides, la réduction du temps de travail à 32h, la diversification vers la transition énergétique.
Exigeons une juste redistribution des richesses produites pour financer les augmentations de salaires et les promotions.