Créés par les pouvoirs publics pour offrir aux employeurs une alternative aux augmentations de salaire, Capgemini transforme insidieusement ces
dispositifs pour s’assurer des bénéfices en limitant la part des salarié·es. Comment ? En jouant sur les seuils de déclenchement et les plafonds. Explications.
Des seuils de déclenchement liés à des gains de rentabilité pour assurer son auto-financement.
La direction aurait pu choisir de redistribuer dès le premier euro de bénéfice. Mais non.
Elle a paramétré, dans l’accord, des seuils de déclenchement.
Ce sont des conditions indispensables pour déclencher l’activation du mécanisme.
Ces seuils sont liés à la rentabilité (les fameux taux de GOP) qui eux-mêmes dépendent des prix de facturation aux clients.
Par exemple en 2021, pour avoir de l’intéressement, il fallait au moins un taux de rentabilité à 12,4 %.
Or, en 2019 et 2020, il était de 11,5 %.
Cela veut donc dire que pour avoir de l’intéressement, il faut augmenter la rentabilité de 0,9 % en 2021.
Et cela ne peut se faire que grâce à des efforts de productivité .
Or 0,1 % de « GOP » ou rentabilité c’est environ 2,8M€ engrangés selon la direction.
Donc en 2021 ce dispositif a fait gagner 25,2M€ à Capgemini alors que l’enveloppe rendue aux salarié·es n’est que
de 12M€.
Autrement dit, ce système ne se déclenche que s’il est largement viable pour le groupe.
Cette enveloppe n’est pas prise sur les bénéfices de Capgemini. Le dispositif est 2,125 fois autofinancé.
Un plafond pour assurer des bénéfices aux actionnaires
Avec ce système, une année record comme l’a été 2021 devrait générer une participation
et un intéressement incroyables. Or il n’en est rien. Pourquoi ?
Parce que la direction met dans l’accord une règle de plafonnement : Le dispositif sera limité à 50M€ quoiqu’il arrive.
Le groupe pourrait donner beaucoup plus mais la direction nous dit qu’il ne faudrait pas qu’on mette « les équilibres en danger ».
Discours hallucinant où l’on nous explique que quelques millions d’euros pris sur les bénéfices record pourraient couler le groupe….
La direction a surtout peur de trop en rendre aux salarié·es alors que c’est nous qui faisons les efforts et produisons la richesse.
Elle a peur de ne pas en donner assez aux actionnaires.
C’est donc un système autofinancé, qui est plafonné et verrouillé quoiqu’il arrive : face, la direction ne perd pas (grâce au plafonnement)
et pile, elle gagne (grâce au seuil de déclenchement).
Et puis surtout ce système implique ce système implique que les salarié·es deviennent actrices et acteurs de cette course à la rentabilité, permettant ainsi
d’accepter les efforts, les dégradations des conditions de travail, les salaires bien trop bas face à l’inflation…
Une redistribution injuste
L’accord de participation prévoit que le calcul des sommes soit proportionnel à une part du salaire. Lors de sa proposition initiale concernant l’intéressement la direction a proposé de calculer les sommes en prenant comme critère le salaire pour 50 %.
Avec ce système, les entités comme Infra CIS et surtout ER&D ont des sommes bien moindres qu’Appli ou Invent.
Parce qu’il est lié à la rentabilité mais surtout aux prix de facturation.
Ces entités sont une fois de plus lésées. Même la CFTC l’a noté en réunion de CSEE ingénierie : ce calcul ne permet pas une juste redistribution de la richesse produite (pourtant la CFTC ne fait pas partie de l’intersyndicale et signe l’accord, c’est dire !).
Ce système est injuste car il demande des efforts à tout le monde, redistribue selon les entités et favorise les plus hauts salaires.
Finalement, devant une forte opposition, le calcul pour l’intéressement ne sera qu’en fonction que du temps de présence.
Des sommes qui restent aux mains de l’un des principaux actionnaires de Capgemini
C’est Amundi qui gère les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement.
Et lorsqu’un·e salarié·e veut empocher les sommes immédiatement, il y a bon nombre de messages d’avertissement indiquant que cela
sera soumis à imposition et qu’il vaut mieux le laisser placé.
Et pour cause, Amundi est l’un des principaux actionnaires de Capgemini.
Cet argent reste donc entre les mains d’un des actionnaires de Capgemini qui le regroupe et le fait fructifier davantage.
Cela lui permet d’empocher bien plus que ce qu’il redonne aux salarié·es.
Évidemment, il ne s’agit pas là d’investissement si ce n’est qu’une rentabilisation boursière. Et donc ce système est exonéré de cotisations sociales.
Or ce sont ces cotisations qui financent notre protection sociale. Cela contribue donc à son affaiblissement pour le plus grand bonheur des
intérêts privés.
Le mirage de la redistribution en 8 points
Avec ce système de participation et d’intéressement, la direction fait donc croire à de la redistribution alors que ce n’est pas du
tout le cas.
- Ça l’exonère d’augmenter les salaires. Cela permet de calculer sur une base plus faible puisque l’enveloppe de l’excédent brut
d’exploitation est par définition plus faible que l’activité globale. - Les règles sont définies par l’employeur avec des familles métiers et des seuils de déclenchement
intégrant des règles de rentabilité, ce qui lui assure une forte rentabilité. La direction sera
forcément gagnante. - Les règles permettent à l’employeur un plafonnement de l’enveloppe.
- Les règles permettent de donner moins aux salarié·es des entités déjà les moins bien rémunéré.es.
- Les règles favorisent les plus hauts salaires.
- Un dispositif non soumis à cotisations (donc moins de dépenses pour la direction mais aussi moins de recettes pour la sécu et moins de
cotisations pour les retraites des salarié.es). - Un dispositif qui nous incite à laisser les sommes chez Amundi, un des plus gros actionnaires de Capgemini : finalement l’argent qui est supposé être donné au salarié.es reste aux mains des actionnaires.
- Ce système ne résout pas le problème de la hausse des prix galopante pour les salarié.es. En effet participation et intéressement
fluctuent d’une année sur l’autre alors que les prix ne font qu’augmenter !
On comprend mieux pourquoi la direction privilégie ces dispositifs.
C’est pourquoi la CGT revendique une augmentation générale annuelle de 2500€ pour toutes et tous.
C’est le plus sûr moyen de redistribuer la richesse créée par les salarié·es aux salarié·es de manière
Équitable et pérenne.
Et pour lire tranquillement cet article au format PDF, voici le lien