Le we du 2 et 3 juillet dernier, le journal Le Monde a publié une série d’articles sur le rôle trouble de Capgemini dans la sphère du pouvoir, son intrusion dans les services de l’état et en particulier son rôle majeur dans la destruction des services publics. Un des articles prend l’exemple de l’hôpital de Tours.
La CGT Capgemini a toujours dénoncé cette collaboration du groupe à des politiques néfastes à l’intérêt général et cette collusion avec la macronie.
D’autant que Capgemini, toujours prompt à récupérer de l’argent public, ne déclare pas correctement ses revenus et pratique l’évasion fiscale.
Le groupe a ainsi fait l’objet d’un redressement fiscal, mais atténué (un cadeau fiscal sûrement lié à ses bons et loyaux services).
Si Capgemini veut aider l’état, que le groupe commence déjà par payer correctement ses impôts et qu’il arrête de spolier l’argent public alors que le groupe affiche des bénéfices records.
Ce qui nous interpelle c’est la réponse de Capgemini. Ou plus exactement l’absence de réponse, et l’omerta que le groupe instaure.
La direction refuse de s’expliquer
Les articles sont sur le site du monde :
A la fin de chaque article, il est écrit que : “Contactée, l’entreprise n’a pas souhaité répondre.”.
Le groupe a donc eu l’occasion de s’expliquer et d’apporter des éléments contradictoires.
Il est certain que ces articles montrent un visage du groupe qui n’est pas vraiment celui que la communication du groupe voudrait afficher.
Plutôt que d’assumer et faire face, la direction fait l’autruche.
Elle impose l’omerta pour éviter des répliques dans d’autres journaux.
Ainsi, La direction envoie un mail à tous·tes les salarié·es du groupe le lundi qui suit à 8 h en écrivant que : “Les articles du Monde font une présentation particulièrement biaisée de nos activités et comportent de nombreuses erreurs factuelles.”
Bien entendu il n’y a pas plus de détails sur ces supposées nombreuses erreurs.
Il est vrai que le journal le monde est connu pour son manque de sérieux et son absence de rigueur journalistique.
D’autant que le Canard Enchaîné reprend quelques jours plus tard les mêmes informations.
Et ce n’est là que l’extrait d’un mail sans précédent et proprement hallucinant. Cette communication est digne de la propagande soviétique.
Un mail de Marcomm le lundi à 8h00
Ce mail pour éclairer ? Pour rétablir la vérité pour corriger les “nombreuses erreurs factuelles” ?
Non. Un mail pour imposer le silence à tout le monde et produire une communication en phase avec l’éthique que le groupe voudrait afficher.
“le Groupe étudie l’ensemble des actions à sa disposition.“.
Comprendre : “on fait l’autruche et on attend que ça se tasse. En attendant on va formater une meilleure réponse pour l’image du groupe qu’il faudra relayer”.
“Nous avions pu, dans ce cadre, échanger librement et répondre en toute transparence aux questions de la Commission. “.
Lire : ” On pensait pourtant les avoir bien baladés”.
“Et nous avions notamment partagé les modalités de collaboration et d’éthique que nous mettons en œuvre dans les relations avec nos clients“.
Comprendre : “nous avons donné une bonne image pour continuer notre business tranquillement”.
“Tous les marchés publics auxquels nous participons sont attribués à la suite d’appels d’offres, conformément à la réglementation. Nous respectons scrupuleusement ces règles, les règles garantissant l’absence de conflits d’intérêts et, le cas échéant, les protocoles de sécurité que nos clients nous imposent.”.
Lire : “c’est pas notre faute si la macronie nous choisit et de toute façon on ne dira rien sur nos relations”.
“Le contenu de nos missions et les montants que nous facturons à chacun de nos clients sont couverts par des clauses strictes de confidentialité.“. Comprendre : “on ne dira rien non plus sur le pognon de dingue qu’on empoche”.
“Si vous êtes interrogés par des clients ou des tiers, merci de contacter votre manager qui assurera le relais auprès des personnes mandatées pour communiquer.“.
Lire : “surtout ne dites pas la vérité des dessous de Capgemini, laissez-faire les managers qu’on va formater”.
“Si vous êtes sollicités par un journaliste, merci de contacter le service de presse“.
Comprendre : “hou la la ! gros danger pour notre image, il ne faudrait pas que d’autres journaux confirment ce que révèle Le Monde”.
L’omerta imposée par la direction de Capgemini
On comprend donc à la lecture de ce mail que l’affaire est prise très au sérieux.
Elle compromet l’image policée que veut donner le groupe.
La réponse de la direction est donc claire : l’omerta plutôt que la transparence.
La pensée unique plutôt que le pluralisme.
La novlangue plutôt que le débat d’idées.
Avec tous les outils de flicage et de délation en interne que le groupe Capgemini a mis en place, nous sommes dans une sorte de mix entre “le meilleur des mondes” et “1984“.
Les conclusions de la commission d’enquête Sénatoriale sont accablantes
Mais revenons à la relation entre le groupe et le pouvoir macronien.
N’en déplaise au country board France qui a signé cette communication, les articles du Monde et les conclusions du rapport de la Commission d’enquête Sénatoriale sont accablants pour le groupe et sa façon de procéder.
Ils en disent long sur la connivence avec le pouvoir.
Les préconisations ne laissent pas la place au doute :
À tel point même que devant l’inaction du gouvernement – et pour cause – cette même commission a écrit à la première ministre pour lui enjoindre de légiférer :
Une mission d’information parlementaire pour faire la lumière
La question a même été reprise par l’assemblée nationale, par la voix du président de la Commission des finances : “J’annonce une mission d’information sur les cabinets de conseil privés à la suite des polémiques Mc Kinsey et Capgemini, pour connaître leur rapport qualité-prix, leur nécessité et leur rôle.”
Autant dire qu’avec un parlement où la macronie ne règne plus en maître, il y a de fortes chances que la vérité sur les dessous de ces prestations éclate au grand jour.
La démocratie en sortira sans doute renforcée.
Il y aura désormais probablement davantage d’éthique dans l’intervention des cabinets de conseil comme Capgemini (la vraie, pas la virtuelle qui sévit au sein du groupe).
Il faudra plus que de la novlangue et l’omerta pour que la firme continue ses petites affaires avec le pouvoir macronien…